A propos de l’auteur :
Roger Cole est docteur et professeur certifié de Yoga Iyengar ; il enseigne à « Yoga Del Mar » près de San Diego en Californie, USA. Il est spécialisé en Anatomie et Physiologie du Yoga et de la relaxation. traduit par Marion Dupuy pour yogaoléron
Avez vous fait 50 postures sur la tête aujourd’hui ? Et 50 positions du triangle ? Cela paraitrait excessif ne pensez-vous pas ? Mais faire 50 « chien qui regarde en l’air» ou « chiens tête en haut » en sanscrit « Urdhava Mukha Shvanasana » par jour peut devenir très courant si vous allez à un cours de Vinyasa Flow ou d’Ashtanga Yoga. Par exemple, dans la première série de K.Pattabhi Jois, vous prendrez la pose du « chien qui regarde en l’air» 50 fois par session parce que cela fait partie de la salutation au soleil ou « Surya Namaskar » qui réunit toutes les autres postures.
Comprenez-moi bien : Faire plein de « chien qui regarde en l’air» peut être une très bonne chose, si vous les réalisez correctement. Vous allez obtenir des bras et des jambes forts, une large poitrine ouverte, une colonne vertébrale souple, et une respiration profonde et puissante. Mais si vous allez trop loin ou que vous utilisiez une mauvaise technique, toute cette répétition peut user votre corps, spécialement le bas du dos. La même chose est vraie si vous pratiquez le « chien qui regarde en l’air» seulement quelques fois mais en le tenant en profondeur et longtemps.
Ressentir la pression
Si vous ressentez de la douleur dans le bas du dos dans le « chien qui regarde en l’air», ou Upward Facing Dog en anglais, c’est sûrement parce que vous compressez les vertèbres de la base de la colonne vertébrale. (Mais cela peut aussi être du à quelque chose de différent, donc il vaut mieux avoir l’avis d’un professionnel de la santé si vous avez des doutes).
La douleur de la compression du bas du tronc se fait à cause d’une part du coincement de la partie arrière des os vertébraux qui appuient les uns sur les autres, ou d’autre part, du fait de l’écrasement des tissus tendres (cartilages, ligaments, et disques) entre les os.
Des capteurs sensitifs dans la partie extérieure du revêtement des os et tout le long des structures molles, sont là pour vous prévenir quand vous provoquez des blessures aux tissus ou que vous êtes sur le point de le faire. Certaines personnes, découvrent par elles même comment réaliser les poses sans se faire mal, mais beaucoup d’autres décident simplement de tolérer un certain niveau de douleur et d’inconfort, une recette à succès pour les blessures, surtout si vous pratiquez régulièrement ou intensément, ou les deux !
C’est très facile de protéger le bas de votre dos, lors de Urdhva Mukha Shvanasana, ou UMS, si vous utilisez les bons mécanismes du corps. Mais ils ne sont pas faciles à apprendre durant un enchainement (ou « flow ») rapide dans une série de Vinyasa (qui veut aussi dire « enchainement de postures » mais en sanscrit cette fois), dans laquelle vous allez prendre la position en une seule inhalation et en sortirez en une seule expiration.
En prenant la pose par étapes et en y restant plus longtemps, vous avez plus de temps pour « entrer » dans la posture juste, mais ce n’est pas idéal non plus, surtout si vous n’êtes pas clair sur la manière de la réaliser.
Donc, que vous pratiquiez lentement ou rapidement, pensez à vous poser quelques instants pour apprendre comment cajoler votre corps et votre esprit dans le « UMS » et ainsi ouvrir votre cœur sans flinguer votre dos !
Eléments théoriques
Vous pouvez éviter de coincer vos vertèbres inférieures en appliquant 2 principes généraux :
1. Placez une traction (étirement dans 2 directions opposées) sur la colonne pour augmenter l’espace entre les vertèbres, et ainsi, distribuer la flexion arrière le long de toute la colonneainsi que des hanches, pour que la base de la colonne ne soit pas forcée à aller plus loin que sa limite.
Pour installer une traction dans votre colonne, vous avez besoin d’utiliser une force extérieure pour tirer dessus tout le long.
Application
+ Par exemple, vous pouvez vous préparer à un « UMS », en vous accrochant par les mains à une barre transversale, et en utilisant la force de gravité pour étirer, dans la longueur, le milieu et le bas de la colonne,
+ Ou en se pendant à l’envers ce qui va mettre une traction tout le long de la colonne (voir le Yoga Hamac et autre Yoga volant). Ceci éloigne les vertèbres les unes des autres, permettant aux disques intervertébraux d’essorer l’eau en trop et de se regonfler.
+ Dernière option, et de loin la plus simple, levez vos bras au dessus de votre tête, laissez tomber la tête légèrement vers l’avant et faites remonter l’os du pubis vers l’avant, ce qui a pour effet d’arrondir votre dos en l’étirant vers ses 2 extrémités. On pratique cet étirement debout les pieds à plat, ou en montant sur nos orteils.
Si vous pratiquez ensuite le « UMS », vous avez plus d’espace pour plier en arrière avant que les vertèbres n’entrent en collision.
2. Distribuer la flexion arrière le long de toute la colonne et des hanches, requiert un effort spécial, i.e. vous concentrer sur la partie haute du dos, son milieu et sur les articulations entre votre bassin et les os des cuisses (appelées articulations coxo-fémorales). Pourquoi ? Parce que le bas du dos est la partie qui a le plus naturellement tendance à plier vers arrière (extension), donc si vous ne faites pas un effort conscient pour plier à un autre endroit, c’est le bas du dos qui va se plier en premier et plus loin que les autres parties. Pour l’éviter, vous pouvez préparer le haut et le milieu du dos à « UMS » en arquant le dos guidé par le centre de la tête (Saharsrara) en direction de l’arrière à partir d’une position assise.
Application
Commencez par positionner le dossier de la chaise juste au dessous de la base de votre cou et travaillez ensuite votre chemin vers l’arrière à partir du milieu de votre tronc, une ou deux vertèbres en même temps et sur les expirations.
Pour préparer vos hanches, pratiquez des positions de fentes comme le guerrier 1 (Virabhadrasana 1), avec l’arrière de la jambe arrière étiré mais letalon de votre pied décollé du sol. Quand vous réalisez la fente, essayer d’incliner les crêtes iliaques vers l’arrière vers une position plus droite. Chaque degré de votre flexion arrière dans le haut du dos, milieu du dos, et articulation des hanches va diminuer la pression qui s’exerce au bas de votre dos dans le « UMS » et les autres extansions avant.
Pratique //
Vous pouvez progressivement appliquer ces deux principes : installer une traction dans la colonne et distribuer la flexion arrière tout le long du dos et des hanches en abordant le « UMS » avec vos mains sur le dossier d’une chaise, et ensuite substituer des briques de yoga à la chaise et finalement prendre la position finale avec vos mains directement sur le sol.
Voici comment : Roulez un matelas qui a une bonne adhésion, de manière à ce qu’il soit perpendiculaire et en contact avec le mur. Placez une chaise sur le matelas avec ses pieds arrière contre le mur, et posez le morceau libre du matelas sur la chaise en le pliant deux fois, de manière à ce qu’il couvre l’assise.
Placez vos mains sur la chaise avec vos doigts suspendus au dessus des bords droits et gauches du dossier. Pliez vos coudes et vos genoux et ramenez vos hanches en avant jusqu’à ce qu’elles touchent le bord avant de l’assise. Avec vos coudes pliés, tirez vos mains en arrière comme si vous tiriez la chaise loin du mur, cette action va conduire les côtés de la poitrine (la partie qui est normalement couverte par les bras) en avant, en face de vos bras. Tout en faisant ceci, roulez également le haut de vos épaules en arrière et vers le bas, et soulevez vos clavicules. Ces actions vont initier une flexion arrière concentrée sur le milieu et le haut du dos.
Maintenant étirez vos coudes, et bougez vos épaules vers le bas aussi loin que possible de vos oreilles. Ceci va remonter entièrement votre colonne vertébrale et créer un soutien musculaire puissant. Autorisez vos muscles abdominaux et arrière à être complètement détendus, et laissez le poids de votre bassin et de vos jambes doucement tirer les vertèbres de votre bas du dos séparément. Maintenant bougez votre poitrine et tout le haut du corps plus près du mur, de manière à ce que vos bras s’inclinent en avant. Cette inclinaison va diriger la force de vos bras et tirer la colonne plus fortement éloignée de votre bassin, améliorant la traction. Au même moment roulez vos épaules loin en arrière et en bas, et repliez votre menton en bas vers votre poitrine. En gardant votre menton en bas, déplacez toute votre tête en arrière pendant que votre poitrine continue à aller vers l’avant pour créer une flexion avant à la base de votre cou, levant votre visage à mi-chemin vers le plafond. Expirez librement pour finaliser la pose.
Pour approfondir
Quand vous pouvez prendre le « UMS» avec une chaise sans inconforts, vous êtes prêts à passer à l’étape suivante : les mains posées sur des briques. Pliez 2 couvertures pour créer un rectangle qui est plus large que vos épaules et de à peu prêt 5 centimètres de hauteur. Placez deux briques de la largeur de vos épaules, de travers au sol, avec une des extrémités reposant sur les couvertures pliées et l’autre sur le sol. Vous allez pratiquez « UMS » avec les talons des mains sur la plus haute extrémité des briques et vos doigts pointés vers le bas.
Vous souvenant de ce que vous venez de faire sur la chaise, commencez avec les coudes et genoux pliés et vos hanches aussi proches des briques que vous le pouvez. Cependant votre bassin ne va pas aussi loin en avant que quand vous étiez sur la chaise, vous voulez qu’il soit aussi loin possible sous vos épaules, ainsi il installe le plus de traction possible à la colonne. Quand vos mains et vos pieds sont en position, faites la même chose que sur la chaise. Bien sûr, si votre dos vous fait mal à un moment, arrêtez et utilisez les mêmes solutions que précédemment.
La Posture Finale
Une fois que vous êtes à l’aise avec la position sur les briques, vous êtes prêts à réaliser la posture finale sur le sol ; les instructions sont presque identiques, avec deux différences clés. La plus importante : à moins que ce ne soit extrêmement facile pour vous de vous plier en arrière avec le haut du dos, vous devez restreindre vos épaules pour ne pas qu’elles aillent derrière vos poignets, et ce à aucun moment, dans la position finale. A la fin de la pause, alors que vous poussez votre poitrine en avant au maximum et votre tête en arrière, vos épaules peuvent bouger en arrière aussi, mais pour la plupart des gens c’est toujours meilleur s’ils finissent directement au dessus des poignets et pas derrière eux.
La seconde différence. Placez le dessus de vos pieds sur le sol, et, si nécessaire, tendez-les en avant, pour qu’ils ne retiennent pas votre bassin loin de vos épaules. Avec vos mains sur le sol, la clé pour obtenir de la traction dans votre colonne repose dans la bascule avant de vos hanches et bassin.
Normalement, on ne prend pas « Urdhva Mukha Shvanasana » depuis les genoux pliés dans ces exercices pratiques, mais vous pouvez toujours utiliser les mêmes principes de garder votre bas du dos décompressé et sans douleur quand vous prenez la posture plus traditionnellement. Souvenez-vous seulement de mettre la traction sur la colonne et de répartir la flexion arrière. Quand vous faites cela, non seulement votre dos sera confortable et en sécurité dans le chien qui regarde en l’air, mais encore vous allez pouvoir pleinement et librement profiter de la force, de l’euphorie, et de libération de cette posture fréquemment pratiquée mais souvent désalignée.
Arrêter la douleur
Si votre dos commence à faire mal à n’importe quel moment de Urdhva Mukha Shvasana, le « chien qui regarde en l’air», essayez ces trucs dans l’ordre suivant :
1. Relaxer le bas de votre dos en laissant pendre votre bassin plus bas.
2. Pencher votre tronc plus loin en avant
3. Tirez sur vos bras plus fortement pour soulever votre poitrine plus en avant
4. En avant-dernier ressort, contracter les muscles à la base des fessiers, où ils se réunissent l’arrière de vos cuisses, pour basculer le bassin droit en avant (ceci doit être abandonné avec l’expérience).
5. Et en dernier recourt, pliez vos genoux